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Un blog où je vous fais partager mes chroniques littéraires, mes coups de coeur, j'essaie de mettre en lumière des romans, des livres qui semblent dans l'ombre. Je suis une amoureuse des mots assemblés, de ces personnages de romans que l'on croise, que l'on rencontre dans nos vies.Tous ces mots qui nous enveloppent sans cesse et que l'on n'ose pas dire, qu'on n' arrive pas à écrire, qu'on garde au fond de nous comme des larmes et qu'on retrouve dans les livres. Une page pour partager l'art littéraire, parce que l'art c'est ce qui nous fait respirer et qui nous sauve de tout.

03 Jun

Nous étions des être vivants de Nathalie Kuperman

Publié par Sansfin

Nous étions des être vivants de Nathalie Kuperman

Nathalie Kuperman excelle dans son roman "Nous étions des êtres vivants". Elle raconte l'histoire d'une entreprise de presse qui fait faillite et qui doit accueillir un nouveau directeur pour un nouveau plan social. Un roman polyphonique, des personnages prit dans un labyrinthe de mots. Derrière les portes, on entend les voix, les peurs, les sarcasme, les cris, les larmes. Une hiérarchie qui tient ses salariés avec des ficelles,pas le droit d'être fragile, d'être pessimiste, d'être faible. Il faut être un battant puisque la politique de ce nouveau directeur n'a pas le temps d'en faire des gagnants. Des salariés qui essaient d'y croire encore alors qu'ils sont pris à la gorge et qu'ils ont une épée de Damoclès au - dessus de la tête. Il y a ceux qui transgressent les règles , ceux qui dépassent les idées de la hiérarchie, ceux qui mesurent leurs paroles , ceux qui dénigrent. L'auteur dépeint avec psychologie les uns et les autres. C'est un jeu de rôles, il y a les rumeurs, les non dits, tout se joue sur le fil du rasoir. L'écrivaine dessine un beau portrait réaliste et inquiétant du monde du travail où le pouvoir n'a pas d'allié. Les masques tombent au fil des pages et chacun doit choisir son camp. La reconnaissance d'aujourd'hui ne se trouve que dans les mots. Il faut apprendre à trouver la lumière dans l'instabilité. L'auteur nous touche, son écriture est subtile, cynique et à la fois pleine d'humour. De la belle littérature. À lire absolument .

 

 

Extraits du roman :

 

 

" J'aime cette paresse tranquille qui nous unit et qui fait de nos huit heures des moments où l'enjeu reste de devoir faire sa journée, et puis de rentrer chez soi, de trouver un chat qui nous aime, une télévision parfois, un lit qui nous connaît bien. Programmer le réveil pour sept heures le lendemain et repartir vers la confiance, sans crainte, sans peine, sans angoisse. Que cette vie-là ne s'arrête jamais."

 

" Nous savons pas ce que nous allons faire de cet endroit, ce que nous allons y vivre, ce que nous allons y subir, mais nous sommes contents. Il n' y a qu'à regarder nos visages. Un apaisement visible se lit sur toutes les faces. Car nous sommes des faces qui renvoient des situations. Et la situation n'est soudain plus si dramatique que ça , puisque nous pourrons bénéficier de tickets restaurant , nous qui ne connaissons que l'univers de la cantine. Et nous serions presque reconnaissants au destin, la bouche en cœur, et les tripes remises bien à leur place. Fêtons ! Et oui, buvons du champagne. Nous sommes vraiment unis. Et la solidarité dont nous faisons preuve fournit à nos lèvres le prétexte de sourire pour de bon , sans arrières pensées, sans solitude."

 

" Nous ne voulions pas de cet homme, présenté comme le seul désirant relever le challenge de redresser notre société. Mais nous désirions continuer de vire et de créer. C'est lui ou rien, nous a t-on répondu. Plutôt lui que rien, avons-nous répondu. Bien mieux que... Bien mieux que quoi ? Pointer au chômage ? Ne plus travailler ? Ne plus se croiser devant la machine à café ? Ne plus concevoir de jeux pour les enfants ? Ne plus leur écrire d'histoires ? Ne plus fidéliser les abonnés ? Ne plus entraîner les non-fumeurs aux pauses clopes pour papoter de la soirée de la veille ? Ne plus refuser un déjeuner en arguant un boulot fou, un stress énorme, une pression monumentale ? "

 

" C'est avec une jouissance ignorante d'elle-même que nous nous proclamons indisponibles. On serait presque flattés d'appartenir à un monde où l'on n'a plus le temps de peser l'essentiel , patron d'un semblant soi qui se refuse aux autres tant les autres ont peu de poids à côté de l'enjeu. Enjeu imaginaire, bien sûr, mais qui tient la dragée haute. Je suis débordé, dit-on. Mais l'on aime que ça déborde, que ça nous dépasse, que ça nous inonde. Avoir du temps serait presque l'aveu de notre intimité."

 

" Nous sommes sortis un à un de la salle, le visage fermé. nous ne savions pas quelle direction prendre. Nous ne voulions pas rentrer sagement dans nos box. Nous ne pouvions plus rien faire de nos jambes, de nos mains, de nos cerveaux. nous avancions en tâtonnant, et la présence de celui qui était devant rassurait celui qui le suivait. Nous voulions profiter le plus longtemps possible d'être un groupe, une entité, un ensemble. Nous ignorions encore la douleur d'être seul devant les questionnements du pôle emploi, à devoir prouver que nous recherchions un travail d'une façon hardie. nous allions vite devenir coupables de n'avoir pas su conserver notre poste. Nous devrions expliquer à nos amis comment notre société avait été condamnée du jour où elle avait été vendue. Les gens feraient mine de comprendre ; en ce moment, c'est partout pareil. C'est partout singulier, c'est partout une seule personne à la fois qui soudain perd pied, hallucine, voudrait que ce soit un rêve. "

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